Le bredouillement

 

Le bredouillement

En Anglais, le terme correspondant à « bredouillement » est « cluttering », ce qui signifie « désordre, encombrement ». Alors que le terme français reste descriptif, le terme anglais rend davantage compte de ce qui sous-tend le trouble, un encombrement tant au niveau de la parole elle-même que de la synchronisation entre la parole et la pensée.

Une parole encombrée
Le bredouillement est un trouble de la fluence, caractérisé par un débit anormalement rapide et irrégulier et un grand nombre d’accidents de parole. Se mêlent des disfluences normales mais particulièrement nombreuses (répétitions de mots, reprises, interjections (heu) et des disfluences analogues à celles du bégaiement mais généralement moins tendues : blocages, répétitions, allongements, pauses et prosodie inappropriées.
La rapidité du débit est impressionnante : 12 syllabes par seconde à la place de 5 syllabes énoncées par un locuteur normal. Il se produit alors de fréquents télescopages entre les syllabes (paillon pour papillon). L’accélération mêlée à l’imprécision articulatoire compromet l’intelligibilité de la parole, suivre une conversation avec quelqu’un qui bredouille n’est pas toujours facile.
Cela est d’autant plus difficile que la personne qui bredouille n’a pas réellement conscience de son trouble. L’entourage se plaint davantage que la personne elle-même qui a du mal à s’entendre. La perturbation de l’auto-écoute rend le contrôle de la vitesse – compliqué pour tout un chacun – particulièrement difficile. Les personnes et enfants qui bredouillent y parviennent généralement mieux en dehors de leur environnement familier où spontanéité et contrôle sont peu compatibles. Il leur est plus facile de ralentir en classe ou dans le cadre professionnel, mais au prix d’un gros effort attentionnel – très fatigant.

Une désynchronisation parole / pensée
La vitesse du débit, la perturbation de l’auto-écoute donnent l’impression d’une parole qui échappe à celui qui la dit. Le phénomène de télescopage intervient également au niveau de la synchronisation entre la parole et la pensée. Au défaut d’intelligibilité s’ajoute un discours souvent difficile à suivre du fait d’énoncés amorcés puis interrompus, peu construits dans un déroulement temporel qui s’accommode mal de cette vitesse excessive. A ceci s’ajoute que la personne qui bégaie se prive du soutien des autres en ne s’appuyant pas sur la compréhension de ses interlocuteurs. Plus la conversation dure, plus la parole s’accélère et s’emmêle.

Que faire face à une personne qui bredouille ?
Cette parole autocentrée peut produire de l’agacement chez l’interlocuteur qui a l’impression de ne pas être pris en compte. Parallèlement, la personne qui bredouille peut se sentir mal comprise, voire rejetée, et développer des sentiments négatifs qui amplifient le repli.
Face à quelqu’un qui bredouille, enfant ou adulte, il est important de s’affirmer en tant qu’interlocuteur à l’écoute et désireux de communiquer. La meilleure façon de favoriser l’interaction et d’aider la personne qui bredouille est de rester exigeant en voulant comprendre. Pour cela, on n’hésitera pas, dans une attitude attentive et disponible, à poser des questions ciblées et à reformuler pour mieux comprendre.

Quelle aide thérapeutique ?
L’orthophoniste est le professionnel de référence habilité à traiter le bredouillement – sur prescription médicale. Jusque là quelque peu négligé ou confondu avec le bégaiement, le bredouillement est actuellement pris en compte dans ses spécificités.
Après identification et évaluation précise du bredouillement, la prise en charge sera adaptée à chaque patient. Les principaux axes seront la prise de conscience du trouble (auto-écoute), le contrôle du débit, la prise en compte de l’interlocuteur (contact visuel, écoute, tours de parole, etc.), la construction des énoncés, l’attention, les émotions…

Le diagnostic peut être posé dès l’âge de 7-8 ans. A ce moment, des exigences de performances (rapidité, complexification des énoncés, etc.) interviennent qui mettent en difficulté les enfants qui ont une prédisposition pour bredouiller.
Il semble exister une forte composante génétique: 85% des personnes qui bredouillent ont un membre de la famille qui bredouille aussi. Ceci n’empêche pas une évolution positive, celle-ci étant favorisée par une prise en charge précoce et une forte motivation du patient. La motivation est souvent à travailler, le patient n’étant pas toujours très gêné. Il sera important de considérer le trouble de manière globale et ne pas oublier que les personnes qui bredouillent, même si elles ne sont pas toujours conscientes de leur trouble, souffrent de retours négatifs et ont fréquemment une faible estime d’elles-mêmes.

 

En savoir plus

Le bredouillement

Le bredouillement est un trouble de la fluence qui se caractérise par un débit anormalement rapide, irrégulier et précipité.

Par Véronique Souffront, orthophoniste
Image et montage Mélissa Bronsart

Vidéo : le bredouillement

Cette vidéo a été créée dans le cadre d’un mémoire en orthophonie par deux étudiantes, Amélie Toth et Charlotte Lombard.

Plaquette bredouillement à destination des professeurs

Voici une plaquette réalisée par Marguerite Fouilland dans le cadre de son mémoire de fin d’étude d’orthophonie.

Vous pouvez la décharger au format PDF ici.

Bégaiement, bredouillement de l'enfant
- De la théorie à la pratique clinique

Marine Pendeliau, Véronique Aumont-Boucand

Ce nouveau matériel se présente sous la forme d’un livre et de fiches pratiques en pdf, et traite de l’évaluation et du traitement orthophonique des enfants qui bégaient ou qui bredouillent entre 2 et 12 ans.
Il propose trois parties principales :
- des données actuelles sur les recherches internationales
- des données sur le bilan et la rééducation de l’enfant de maternelle
- des données sur le bilan et la rééducation des enfants d’âge scolaire (école élémentaire)
Editions Ortho Edition - 2022, 148 pages

Peur de bégayer, bégayer de peur

Actes du 8ème colloque international de l'APB

Le 8ème colloque organisé par l’Association Parole Bégaiement a réuni des personnes qui bégaient ou qui bredouillent, des thérapeutes et des chercheurs autour du thème « Peur de bégayer, bégayer de peur ». Les témoignages et les communications abordent de façon complémentaire les différentes facettes de cette peur qui apparaît comme une émotion centrale, pouvant aller de la simple appréhension à la panique. Autour d’elle se greffent des conduites - principalement d’évitement - qui impactent le trouble jusqu’à en devenir parfois l’élément essentiel, au prix d’une grande souffrance.
Qu’en est-il de cette peur ? Est-elle constitutive du trouble ? En est elle une conséquence ?  Peut-elle avoir une incidence sur son apparition ? Peut-on sortir du bégaiement/bredouillement sans faire face à sa peur ? Toutes ces questions sont reprises lors de ce colloque qui a été également l’occasion de faire le point sur les recherches et les avancées thérapeutiques au niveau mondial avec la présence d’invités internationaux.
Conférenciers invités : Dr Marie-Christine Franken, (Pays-Bas), Dr Kurt Eggers (Belgique), Vincent Gérard (Belgique), Dr Jean-Christophe Seznec (Paris).
APB Editions - 2018, 136 pages

Peur de bégayer, bégayer de peur, édition papier : 12.00€ (port compris)

Peur de bégayer, bégayer de peur, édition numérique : 7.50€

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Revue de l'ICA - International Cluttering Association

Volume 13 – 2 juillet 2023

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